Quantcast
Viewing latest article 1
Browse Latest Browse All 4

Corpus à moudre

Exemple de violence verbale fulgurante: Christophe Hondelatte s’adresse au chanteur Dave (émission “17ème ascenseur” de Laurent Baffie du 24 novembre 2012)

Extrait du parisien en ligne (lien ci-dessous):

“A bout de nerfs, une fois de plus. Le journaliste Christophe Hondelatte a encore «pété les plombs», devant les caméras de télévision. Cette fois, c’est le chanteur Dave qui en a fait les frais. Sur le plateau de « 17 ème sans ascenseur » diffusée sur ParisPremière et présenté par Laurent Baffie, le journaliste n’a pu retenir un flot d’injures.

Au début tout va bien…jusqu’à la chute. 

L’émission se lance avec Marcel Campion, le gérant de la foire du trône, qui met l’ambiance en jouant un morceau de jazz manouche à la guitare. Hondelatte s’éclate. On le voit faire des grimaces et chanter très fort. Autour de la table, la chanteuse Olivia Ruiz, Adamo et Cali tapent volontiers dans les mains tout en surveillant en coin Hondelatte. Soudain, dès que la musique s’arrête, l’ancien présentateur de «Faites entrer l’accusé» éructe contre son voisin. « Le mépris de Dave pour les musiciens qu’il appelle amateurs est absolument insupportable ! » s’enflamme-t-il. «Il a beau être une gloire nationale, je lui chie à la gueule. Tu ne respectes pas les musiciens ! »

Impassible alors qu’ils sont côte à côte, Dave rit, applaudit. « Aaaaah enfin, un moment de télévision », ironise le Hollandais. «Ce n’est pas un coup de télévision, j’en ai rien à branler des caméras ! Tu es nul, tu es misérable, tu ne respectes pas le musicien qui est en face de toi», lui rétorque Christophe Hondelatte, qui s’enflamme de plus en plus. « Ce mec qui joue de la musique est peut-être meilleur musicien que toi. Tu es juste un produit du show bizz ! MERDE, MERDE et MERDE ! Quand un musicien joue on l’écoute. Tu n’as pas écouté une minute. Tu bavasses à côté comme une starlette du show-bizz ! »

Alors qu’Hondelatte n’arrive pas à se calmer et continue à hurler, Dave fait une pirouette. Avec sa voix haut perché qui a fait son succès, il entame «Stop in the name of love … before you break my love » (Arrête au nom de l’amour… avant de me briser le coeur, ndlr), une célèbre chanson de Diana Ross.”

Un lien direct pour accéder à la vidéo et texte extrait du site leparisien ci-après  :

http://www.leparisien.fr/laparisienne/actu-people/videos-clash-hondelatte-a-dave-tu-es-nul-tu-es-miserable-26-11-2012-2356759.php

—-

Commentaires:

Ce qui est intéressant dans cet extrait, c’est qu’il permet de saisir ce qui est très difficile à saisir lorsque l’on est chercheur de terrain. Les moments de violence verbale fulgurante au quotidien sont en effet difficilement enregistrables, à la fois pour des raisons de tempo et des raisons éthiques. On voit ici différentes choses en cours, dues également au format de l’émission: il y a une interaction de groupe, au cours de laquelle l’animateur qui “reçoit” dans son émission, se moque de celui qui est en train de chanter. Cela est certes compris comme étant son rôle et faisant partie du personnage ; néanmoins, la teneur réelle des propos commentant l’aspect physique de la personne qui chante, lorsqu’elle chante, sont réellement agressifs et surtout, sont de nature à l’inquiéter. La nature même de la situation veut que lorsque l’on passe à la télévision on s’expose à travers son image, et que l’on cherche donc à être à son avantage – ce qui est normal. Dans ce contexte, répéter à quelqu’un “c’est laid quand tu chantes, arrête de faire des grimaces, etc.” revient à chercher à lui faire perdre la face (même si cela est donné à voir comme de l’humour). Ce qui se passe alors est que l’agressé finit en effet par réagir à cette montée en tension (inquiétude intériorisée, mais provoquée par un contenu sémantique et symbolique très fort venu de l’extérieur), mais pas envers la “bonne personne”. Plusieurs raisons peuvent expliquer cela : une forme de crainte des représailles, une perte momentanée des repères parce que c’est la personne qui invite qui agresse ; ou encore d’autres raisons du jeu interactionnel qui nous sont inconnues parce qu’invisibles à l’écran, etc. Toujours est-il que c’est ici un tiers, finalement, qui “prend tout” suite à une petite remarque anodine, et relativement faible en termes de contenu agressif. En termes interactionnels, il y a une forme de redoublement du bouc émissaire: le vrai bouc émissaire serait plutôt ici celui que l’on fait passer pour l’agresseur et qui réagit à une autre agression. Le schéma qui se joue est donc bien à 3 personnes (au moins), et non entre deux, comme le présente les commentaires des médias.

On retrouve ici une forme de schéma interactionnel récurrent en termes de violence verbale que j’appellerais  : “l’agression au tiers émissaire”.  On le retrouve par exemple chez l’automobiliste qui injurie les personnes présentes dans la voiture, suite à une incivilité ou agression d’un autre automobiliste. Ou encore chez celle ou celui qui ressortant énervé(e) d’une interaction verbale tendue comprenant des scénarii d’agression à son égard, auxquels il a fallu céder – en renonçant à réagir sur l’instant pour diverses raisons, qui sont souvent hiérarchiques et institutionnelles dans le cadre du milieu professionnel – va réagir à contretemps et se mettre à agresser une tierce personne (par exemple, femme, mari, enfants, une fois rentré(e) chez elle/lui.


Viewing latest article 1
Browse Latest Browse All 4

Trending Articles